Parce que là la vie passe sans créer aucun souvenir



Je fais des photos parce qu’on ne voit pas tout. On croit savoir ce qu’on voit mais on ne voit pas. En figeant un cadre la photographie ouvre. Je m’intéresse à la pensée comme image plutôt que comme raisonnement. Un objet qui sourd de sa nuit et se présente soudain à la lumière comme une évidence. Il aurait fallu que chaque image soit la dernière, c’est-à-dire qu’elle dise en une fois la quintessence de l’existence et après on peut mourir. Mais ça ne marche jamais et on continue de vivre. Les photos ne sont jamais à la hauteur et finalement c'est pas mal de continuer à espérer. On fait avec et les photos deviennent un vaste réseau d’images, sécrètent une vision, à la manière d’un esprit qui s’incarne dans son enveloppe charnelle à mesure que la vie passe.